Cyclovoyageur et amateur d’ultracyclisme, Stefan Krstic a l’habitude de parcourir de longues distance à vélo. Au-delà de la performance, il apprécie aussi l’aspect humain de ses aventures.
La folie des distances :
C’est durant son adolescence en Valais que Stefan Krstic se découvre une passion pour le cyclisme. Après avoir raté son permis pratique de scooter, il décide d’opter pour le vélo lors de ses déplacements : « Je me suis dit que c’était une meilleure idée que de rouler en scoot’ sans permis. » Le jeune homme réalise alors la liberté que lui offre son nouveau moyen de transport et se met à parcourir des distances de plus en plus longues. Il explore d’abord la Suisse, puis pédale jusque dans le sud de la France avec deux amis. Quelques semaines plus tard, il prend la route d’Amsterdam, seul, et dans le plus grand secret : « Je n’ai rien dit à ma mère, j’ai pris mon courage à deux mains, et je suis parti. »
Inspiré par des cyclovoyageurs.euses rencontré.es en route ou hébergé.es chez lui, Stefan décide de poursuivre ses exploits. En 2020, il relève le défi de traverser les vingt-six cantons suisses en seulement quatre jours, un an avant la création de la « SUCH », une course d’orientation à grande échelle reprenant ce même concept. Il termine également la grande route des Alpes, un parcours escarpé qui le conduit à Nice au départ d’Evian en passant par de nombreux cols. Peu à peu, il commence à pratiquer l’« ultracyclisme », qui consiste à parcourir des distances qu’il qualifie lui-même de déraisonnables. C’est ainsi qu’il se met par exemple au défi de boucler le tour du Mont-Blanc en une seule journée. Ce parcours, qui s’étend sur trois pays, mesure près de 400 kilomètres et présente un dénivelé cumulé de 8000 mètres. Pour relever ce challenge, il part de Sion à une heure du matin, accompagné de deux amis : « Le premier a lâché à Aoste, le deuxième à Martigny. J’ai fait le dernier bout tout seul. » De retour avec 395 kilomètres au compteur, il décide de faire un dernier tour en ville de Sion pour porter le total à 400.
Stefan se lance également dans l’ultracyclisme de compétition en participant au célèbre tour des stations, dont le dénivelé de 8848 mètres est équivalent à celui de l’Everest, mais il avoue préférer les longues distances dans le cadre d’un voyage, loin de l’esprit compétitif. Pour ses aventures, le cycliste choisit toujours un équipement de haute qualité, léger et pratique : « Ça allège le porte-monnaie, mais ça allège aussi les sacoches. » Porté par une philosophie minimaliste, il s’engage à partir toujours plus loin avec toujours moins.
« Je me suis mis à pleurer » :
En 2021, le valaisan réalise ce qu’il considère comme son plus beau voyage. Il quitte Sion pour ralier le village de ses grands-parents en Serbie, sans que ces derniers ne soient mis au courant. Pendant une semaine, il parcours plus de 200 kilomètres par jour et franchit une multitude de cols. Le parcours est éprouvant mais Stefan se sent comme guidé « par une main imaginaire » dans ce périple à la dimension émotionnelle très forte. Après sept jours d’effort intense, il atteint finalement le village de ses grands-parents : « Je suis arrivé dans la rue où j’ai appris à faire du vélo et je me suis mis à pleurer… c’était magique. » Ses grands-parents, très surpris, sont d’abord en colère contre leur petit-fils en le voyant arriver : « Mon grand père ne comprennait pas pourquoi je n’étais pas venu en avion, et ma grand-mère était fâchée parce qu’elle n’avait pas eu le temps de préparer à manger » raconte Stefan en rigolant.
Parmi ses voyages les plus marquants, le valaisan cite aussi la Tunisie, qu’il a atteinte par l’Italie. Ce beau périple, rythmé par des journées intenses et de longues distances, a aussi été l’occasion de faire des rencontres et de vivre des moments de spontanéité inoubliables. Il raconte, par exemple, avoir partagé un repas très convivial avec des Italiens malgré la barrière de la langue, ou avoir été invité à passer une nuit en plein désert par des Tunisiens, une proposition qu’il a acceptée à condition bien sûr de s’y rendre à vélo ! Se laisser guider par le hasard a du bon, mais l’ultracycliste refait parfois surface quand il s’agit d’avaler les kilomètres : « Ça dépend de l’objectif » explique Stefan. « Si le but est de relier un point A et un point B, j’essaie de faire les plus grandes distances possibles. Mais parfois, quand il n’y a pas forcément de destination précise, j’aime me laisser de la marge pour improviser ».
Des histoires par milliers :
Au fil de ses nombreux voyages, Stefan a rarement fait face à de mauvaises expériences. Il confie avoir été gêné par la météo ou la fatigue à quelques occasions, l’obligeant à utiliser d’autres moyens de transport : « Une fois je m’endormais sur mon vélo après une nuit blanche, j’ai fait une sieste mais ça n’a pas aidé. J’ai fini par prendre le train. » Il lui est aussi arrivé de devoir rebrousser chemin en Allemagne, après avoir essuyé une vingtaine de refus pour planter sa tente chez des habitants, mais il raconte avoir été chaleureusement accueilli dès le lendemain dans un autre village. « C’est surtout une question de chance », résume-t-il, en ajoutant que les gens se montrent généralement très bienveillants et prêts à aider.
Aujourd’hui, le cyclovoyageur ne compte plus les rencontres et les beaux moments. Intervenant à DÉF VÉLO, il partage ses histoires et ses conseils avec les plus jeunes « pour essayer de leur donner la petite étincelle ». Si l’ultracyclisme n’est pas forcément à la portée de débutant.e.s, Stefan leur rappelle que d’autres formes de voyages à vélo sont au contraire très accessibles. Il aime donner l’exemple de la « ViaRhôna », un itinéraire cyclable qui longe le Rhône jusqu’à son estuaire en mer et qui constitue de fait un parcours relativement plat. Le valaisan en est certain : après avoir goûté au voyage cycliste, les jeunes ne pourront plus s’en passer…